Pêches sentinelles - Sébaste
Historique
Le Prince de Galles, qui devint ultérieurement le roi Édouard VII, se délecta de sébaste en 1883, lors de l’importante Exposition internationale des pêches.
Si ce poisson de la famille des Scorpaenidae était à toutes fins utiles inconnu en Angleterre en 1883, il n’était guère plus connu au Canada à cette époque. Pourtant, au XXe siècle, le sébaste devait devenir la pierre angulaire d’une importante pêche de la côte atlantique canadienne. Signalons d’ailleurs que les États-Unis sont actuellement les plus important consommateurs de produits canadiens du sébaste.
Description
Le sébaste fréquente les eaux profondes en bordure des bancs de pêches et les chenaux profonds qui se sont creusé au fond de l’océan; il se distingue principalement par sa couleur écarlate brillante qui est à l’origine de son nom anglais (redfish).
Le sébaste se distingue des autres poissons à rayons épineux non seulement par sa couleur frappante, qui va de l’orange au rouge flamme et parfois empreinte de brun, mais aussi par une protubérance osseuse sur la mâchoire inférieure, par un éventail d’épines osseuses situées sur le pourtour de l’opercule et par ses grands yeux.
On connaît deux types de sébaste dans l’Atlantique du Nord-Ouest, le Sebastes mentella étant le plus commun. Celui-ci vit à des profondeurs supérieures à 200 mètres; il est de couleur rouge vif, son œil est relativement grand et le prolongement osseux de sa mâchoire est long et bien développé. Selon des études récentes, il semble qu’on pourrait en réalité subdiviser cette espèce pour y inclure le S. fasciatus. Le S. marinus, dont la couleur tire d’avantage sur l’orange que le rouge, se trouve habituellement à des profondeurs inférieures à 240 mètres; ses yeux sont moins grands et le petit prolongement osseux de la mâchoire inférieure est arrondi et relativement faible. Généralement, il atteint une taille considérablement supérieure à celle de ses proches cousins. Aux fins de la pêche commerciale ou de la gestion des pêches, les deux (ou trois) espèces sont considérées comme une seule unité.
Répartition
Dans l’Atlantique Nord, le sébaste qui est également connu sous le nom de poisson rouge ou chèvre est le principal représentant de la famille des Scorpénidés (nom provenant des épines empoisonnées dont sont dotées les espèces tropicales). Il vit dans les eaux fraîches du Nord (3° à 8°C), des deux côtés de l’Atlantique. Les eaux profondes au large du New Jersey (É.-U) constituent la limite sud de l’aire de répartition du sébaste dans l’Atlantique Ouest. Ce poisson vit habituellement à des profondeurs de 100 à 700 mètres dans le golfe du Maine, au large des bancs de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve, dans le golfe Saint-Laurent, le long du talus continental à partir du sud-ouest du Grand banc jusqu’au banc de l’inlet Hamilton, et dans la région du Bonnet flamand. Dans les eaux très froides de certaines régions du Maine, de Terre-Neuve et de la Baie de Fundy, on a parfois capturé des sébastes dans les eaux peu profondes près des côtes et à proximité des quais, mais cette situation est toutefois inhabituelle. Généralement, les petits sébastes vivent en eaux peu profondes, alors que les gros fréquentent les eaux profondes. Les sébastes s’éloignent du fond durant la nuit et le regagnent le jour venu.
Des études saisonnières effectuées dans le golfe Saint-Laurent ont révélé la possibilité d’une migration hivernale jusqu’à l’embouchure du golfe, entre le Cap-Breton et Terre-Neuve, et d’un retour dans le Golfe au printemps.
Reproduction
Le sébaste est vivipare : en d’autres mots, les œufs sont fertilisés et se développent dans le corps de la femelle. Après l’éclosion, quelques 25 000 à 40 000 alvins demeurent dans les ovaires de la femelle jusqu’à ce que le sac vitellin se résorbe. Ils sont alors libérés et peuvent nager librement.
L’accouplement se produit généralement en septembre ou en octobre et les jeunes naissent entre avril et juillet. Ils mesurent à peu près 7 mm à la naissance et ils nagent librement en surface jusqu’à ce qu’ils atteignent environ 25 mm de longueur; ils gagnent alors des eaux plus profondes aux fonds rocheux et vaseux.
Croissance
Le sébaste a une croissance lente et une longue vie. La croissance varie quelque peu d’une population à l’autre, mais généralement, le poisson atteint à peu près 15 cm aux environs de 4 ans, 25 cm vers 10 ans, 32 cm vers 20 ans et 38 cm aux environs de 30 ans.
Durant les six ou sept premières années, la croissance des mâles et des femelles est sensiblement la même, mais par la suite, celle des mâles est plus lente. La taille maximale du S. marinus, le plus grand des sébastes, est de 50 à 55 cm pour les mâles et de 65 à 70 cm pour les femelles. Pour ce qui est du S. mentella, les mâles atteignent une longueur maximale de 40 cm à 45 cm seulement, tandis que les femelles mesurent entre 45 et 60 cm.
Le sébaste atteint sa maturité sexuelle vers l’âge de 8 à 10 ans sur le Grand banc et légèrement plus tard dans la partie nord de son aire de distribution.
Alimentation
Le sébaste se nourrit d’une combinaison de petits invertébrés et de petits poissons. Il est à son tour la proie de certaines espèces comme la morue et le flétan du Groenland (turbot). Toutefois, on ne connaît pas encore très bien les incidences de la prédation sur les stocks de sébaste
Pêche
Dans l’Atlantique Ouest, le sébaste a d’abord acquis une importance commerciale dans le golfe du Maine, aux environs de 1935. Depuis lors, la pêche a connu une expansion importante à la suite de la découverte d’autres stocks comme ceux du golfe du Saint-Laurent, du Grand banc, du banc Hamilton et du Bonnet Flamand. Ces stocks ont été pour la plupart découverts entre 1947 et 1952, par le navire de recherche INVESTIGATOR II.
La pêche commerciale a pris un essor important durant ces années et a atteint le rendement maximal de 389 000 tonnes métriques (t) en 1959. Suite à l’imposition de contingents établis pour freiner la surexploitation des années précédentes, les débarquements canadiens sont passés de 103 000 t en 1975 à 12 300 t en 1999. Le sébaste a d’abord été capturé au chalut de fond qui était tiré sur le fond marin par un bateau durant le jour. Par la suite, les pêcheurs commerciaux ont constaté qu’ils pouvaient réaliser des prises importantes durant la nuit en utilisant un chalut semi-pélagique. Ce type de chalut ressemble au chalut de fond, mais la différence tient au fait que le pêcheur peut ajuster la profondeur à laquelle il le tire dans l’eau.
Sur le plan commercial, la taille minimale acceptable du sébaste débarqué au Canada est d’environ 25 cm. La plupart des prises sont transformées en filets, dépiautés ou non, lesquels constituent le principal produit des usines de traitement à terre. Elles sont commercialisées sous le nom de sébaste dans l’ensemble de l’Amérique du Nord.
Le sébaste est réparti sur une vaste superficie des eaux côtières de l’est du Canada. La ressource est divisée en sept stocks qui font chacun l’objet d’une gestion distincte. Depuis 1974, tous ces stocks ont été réglementés par un total des prises admissibles (TPA) qui établit la limite maximale exploitable de chaque stock.
Référence
Adaptation du document : Le Sébaste, par McKone, W. D. et LeGrow, E. M., Coll. Le Monde sous-marin, publié par la Direction générale des communications, Pêches et Océans Canada, 6 p., 1984.